Laurent Lemasson
Docteur en droit public et science politique, directeur des publications à l’Institut pour la Justice.
La lutte contre le trafic de stupéfiants est officiellement une priorité de l’action gouvernementale. Pourtant, derrière le discours de fermeté tenu au sommet de l’État, une autre musique se fait entendre depuis longtemps, plus sourde mais persistante. Des voix respectables, et semble-t-il de plus en plus nombreuses, s’élèvent pour affirmer que consommer
des stupéfiants serait un « crime sans victime », que cette activité ne devrait donc pas être pénalisée, ou bien que la lutte contre le trafic et la consommation de stupéfiants cause beaucoup plus de dégâts que les phénomènes qu’elle cherche à combattre.
Si la lutte contre le trafic et la consommation de drogue est une « guerre », alors « l’arrière » semble bien prêt d’abandonner ceux qui sont « au front » et de négocier une paix séparée. En fait, il est clair que l’action publique en ce domaine tend à être entravée par une certaine mauvaise conscience et par des doutes persistants concernant les buts à atteindre.
Il importe donc d’essayer de dissiper ces doutes en examinant méthodiquement la question de la lutte contre la drogue, à la fois dans son principe, dans ses objectifs et dans ses moyens. La lutte contre la drogue n’est nullement une cause perdue, mais elle doit être menée avec à la fois plus de fermeté et plus de discernement que cela n’est le cas aujourd’hui.