Laurent Lemasson, Docteur en Droit Public et Science Politique, responsable des publications à l’Institut pour la Justice.
Le soupçon que la prison, loin d’être un lieu de rédemption pour le criminel, pourrait être au contraire une « école du crime » est aussi vieux que la prison elle-même. Ce soupçon est même devenu quasiment un article de foi dans certains milieux politiques et judiciaires, d’où l’on déduit un second article de foi, à savoir qu’il faudrait au maximum éviter d’envoyer les délinquants en prison que celle-ci ne devrait être que le « dernier recours » destiné à protéger la société contre des individus violents lorsque toutes les autres solutions ont échoué.
Pourtant, l’idée que la prison serait l’école du crime, si elle parait avoir pour elle un certain bon sens, se révèle beaucoup moins solide qu’elle n’en a l’air dès lors qu’on l’examine attentivement et sans préjugés. En réalité toutes les études de qualité effectuées sur le sujet convergent vers la même conclusion : statistiquement la peine de prison a, en tant que telle, peu d’impact immédiat sur la trajectoire criminelle de ceux qui y passent. Mais le fait que la prison ne soit, pour ceux qui y sont enfermés, ni un lieu de rédemption ni un lieu de corruption, ne suffit nullement à condamner cette institution.
La prison a de nombreux effets, directs et indirects sur la délinquance, et se limiter à la question de la récidive des sortants de prison revient à occulter le fait que la peine de prison est un instrument tout à fait essentiel pour lutter contre la criminalité et assurer une vie paisible au reste de la population.