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Publié 17 mai 2023

Rodéos urbains : comment y mettre un terme ?

Avec l’arrivée des beaux jours, les rodéos urbains se font de plus en plus nombreux. Pendant que le ministère de l’Intérieur communique sur l’importance d’y mettre un terme, les moyens des policiers pour l’endiguer sont insuffisants..

Le 22 mars dernier, une femme de 84 ans meurt fauchée à cause d’un rodéo urbain à Brest. Plus les journées s’éclaircissent, plus cette pratique se répand, et avec elle le risque d’un drame similaire. Face aux vagues en cours et à prévoir, la police nationale redouble d’effort. Depuis le 1er janvier, 18 874 opérations anti-rodéo ont été effectuées, ce qui a permis notamment la saisie de 892 engins ou plus de 22 000 verbalisations sur le territoire. Malgré cela, les rodéos se poursuivent, et les accidents avec. Comme Le 14 avril à Bordeaux, où un accident a impliqué 13 personnes. Puis à Behren-lès-Forbach (Moselle), où deux fillettes sont blessées le 30 avril. Plus récemment, le 7 mai, à Blagnac (près de Toulouse), deux spectatrices ont été percutées lors d’une sortie de route. Alors qu’ils risquent de blesser n’importe quel passant, certains chauffards se pavanent sur les réseaux sociaux, en train de rouler à toute allure dans des centres commerciaux.

La presque impossible action des policiers

Face à ces agissements, les moyens des forces de l’ordre sont limités. La plupart du temps, elles peuvent seulement consulter la vidéos surveillance pour tenter d’identifier les auteurs. Sonia Fibleuil, porte-parole de la DGPN, affirme que la police nationale fait tout pour « interpeller les auteurs en flagrant délit, si possible, et en sécurité ». Sur le terrain, les agents témoignent de l’impossibilité de poursuivre les auteurs de ces méfaits.

« Actuellement, il n’y a pas de textes législatifs ou juridiques qui protègent les policiers en cas de course-poursuite. Ils sont présumés coupables s’il y a un accident », affirme Stanislas Gaudon du syndicat Alliance Police. Une loi de 2018 a fait du rodéo urbain un délit, passible de 15 000 euros d’amende et d’un an d’emprisonnement ferme, hors circonstances graves. Trois ans après sa mise en vigueur, un rapport d’information mettait en lumière plusieurs points noirs du texte. Parmi eux, l’absence de cadre juridique clair. L’engagement de leur responsabilité ayant des contours flous, les agents y avouaient craindre d’intervenir, jusqu’à « écarter systématiquement toute prise en charge ».

« la peur de l’émeute » expliquerait pourquoi il est si difficile d’agir pour les policiers

D’autant que cela reviendrait à outrepasser les commandements de la hiérarchie : une instruction de commandement de la Direction centrale de la sécurité publique – dont dépendent tous les commissariats de France – inchangée depuis 2020, restreint la poursuite aux cas les plus graves (fuite ou évasion d’un individu armé ayant l’intention d’attenter à la vie d’un tiers, auteurs, armés ou non, d’un crime de sang, auteurs non identifiés d’autres crimes ou de délits aggravés entrainant un préjudice corporel).

Pierre-Marie Sève, juriste et délégué général de l’Institut pour la justice, évoque « la peur de l’émeute » comme explication. « Ce sont les débordements de 2005 qui ont fait que la hiérarchie policière a décidé de ne plus ‘provoquer’ », poursuit-il. Cet automne-là, deux jeunes adolescents fuient la police et se réfugient dans un transformateur électrique. Ils meurent électrocutés. En réaction, la ville de Clichy-sous-Bois est en proie à de violentes émeutes. La preuve que les représailles surviennent même quand les policiers veulent simplement faire leur travail. De quoi crisper le ministère de l’Intérieur quant aux risques d’accidents. Pourtant, un sondage publié par Cnews le 18 avril indique que 76% des Français sont favorables aux poursuites lors de rodéo urbain, même si cela est dangereux.

La volonté d’une justice plus ferme

Au-delà de la protection des policiers, Stanislas Gaudon réclame « des condamnations extrêmement sévères ». Si la législation prévoit un an ferme pour la commission d’un rodéo urbain, les punitions effectives atteignent rarement ce niveau. Comme à Villefontaine (Isère) où deux auteurs d’un rodéo sauvage ont écopé de seulement neuf et six mois de prison ferme le 19 avril. Idem à Nantes. Mathis T. avait fait le tour des réseaux avec une vidéo d’une virée en scooter dans un centre commercial : il a été condamné à 12 mois de peine à domicile le 9 mai. De fait, les auteurs vont rarement en cellule, même lorsqu’ils y sont condamnés. « En France, l’aménagement des peines fait que jusqu’à un an de prison, vous n’êtes pas incarcéré », rappelle Pierre Marie-Sève. « Il faut des peines planchers et une meilleure exécution des peines pour que la sanction apparaisse comme sérieuse et pas comme symbolique », conclut-il.

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